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Janvier 1997. Base Dumont d'Urville, 140°01 E - 66°40 S. UTC+10 (10h de décalage avec le méridien de Greenwich). Bienvenue en Terre-Adélie sur l'île des Pétrels (Archipel de Pointe Géologie), une charmante petite station scientifique française dans l'Antarctique créée par les Expéditions Polaires Françaises dans les années cinquante.

 

 

 

 

> Janvier 1997 en Terre Adélie
 
 

Vendredi 3 janvier 1997 :

L'encre de mon stylo est froide (pour écrire mon journal) car j'ai laissé ma fenêtre ouverte un peu trop longtemps et ma chambre est gelée!!! Aujourd'hui, j'étais de "Service". Etant 28 à faire l'hivernage, nous avions une journée pour aider la cuisine et faire le ménage collectif, tous les quinze jours. La première chose à faire, c'est débarrasser le petit déjeuner (la table à été mise à 6h par la personne qui a fait la nuit de surveillance de la centrale électrique). Puis on s'occupe du tri des déchets (papier-cartons incinéré, tri du plastique, verre blanc ou couleur, acier, aluminium...), et alors commence le ménage du séjour puis du dortoir (les laboratoires sont nettoyé par les scientifiques concernés évidement). La table pour le déjeuner, les 2 personnes du service (trois en été) mangent avec le cuisinier et le pâtissier à 11h (après l'apéro réglementaire). Puis vers midi, nous servons à table et faisons la vaisselle. Après-midi libre jusqu'au souper où le cycle du midi recommence... Généralement, on en profite pour faire un peu de lessive (si la centrale et les réductions d'énergie électrique, le permettent!)


Dimanche 5 janvier 1997 :

C'est la tempête depuis hier matin (vent "chasse neige" à plus de 130 km/h). Il faut pourtant sortir pour travailler mais gare au vent! Il n'est pas rare que les lunettes ou les bonnets soient emportés. Du coup, la banquise a débâclé. Ce matin à 8h, je voyais une barre sombre à l'horizon. A 9h, on voyais la mer distinctement. Toute la journée, la glace a cassé, l'eau a gagné. Ce soir à minuit, la liaison entre l'île des Pétrels et la piste d'aviation du Lion était intacte mais à 1h déjà, un morceau manquait. Ma fenêtre me donne une vue sur le nord et donc là d'où arrive le bateau. Donc je le verrais arriver demain matin.

Je profite donc des derniers instants où je peux observer à la jumelle les manchots Adélies sur la banquise. Ils se regroupent sur le bord de la glace et attendent d'être une vingtaine pour pouvoir plonger, de peur de se faire croquer par un phoque léopard. Et c'est impressionnant de voir la vitesse à laquelle ils se jettent à l'eau (2 secondes maximum). Remarquez qu'ils en sortent aussi vite, et lorsque on se promène au bord de l'eau, il n'est pas rare de se recevoir un adélie "sautant" et qui de peur se rejette à l'eau de suite!!!


Lundi 6 janvier 1997 :

L'Astrolabe est arrivé ce matin aux environ de 5 heures. Certaines personnes (et bien évidement l'équipage) sont donc restée sur ce bateau depuis un mois!!! Il est "à quai" à la piste du Lion où le déchargement a tout de suite commencé. La plupart des colis sont transporté par l'hélicoptère. Pour la petite histoire, le bateau avait été "adapté" pour le déchargement par le côté de la cale (une porte a été créée en montant un côté du haut de la coque sur channières).

Mais vu les difficultés qu'ils ont eu pour le refermé la première fois, elle n'a jamais servie, de peur de rester bloqué avec la cale ouverte! Encore des millions dépensés pour pas grand chose... Toute la base est en ébullition! L'astrolabe repartira le 9 janvier au matin, et vu le retard que la campagne d'été a pris, la rotation R2 sera peut être annulée. Dans le doute, tous les anciens hivernants ou "campagnards" qui devaient partir à R2, partent dans 3 jours...


Mercredi 8 janvier 1997 :

Ce soir, les passagers pour la 2ième rotation du bateau (R2) sont allés y dormir. Du coup, histoire de dire une dernière fois au revoir à nos prédécesseurs, nous avons entrepris d'aller les voir sur le bateau. Le seul problème, c'est que la banquise n'est plus très solide pour y aller, et certains s'y sont pas mal enfoncés (n'est-ce pas Nicolas?). Autre difficulté, il fallait aborder le navire et pour monter sur le pont à la corde gelée, pas facile!!! Cette fois, c'est Taz qui a eu des problèmes!!! Mais bon, on a bien rigolé...

Jeudi 9 janvier 1997 :

Ce matin à 9h, le bateau est parti en direction de l'Australie. Les anciens hivernants qui sont encore là et qui ne repartiront que par les prochaines rotations, ont un peu le coeur gros de voir partir leurs anciens compagnons de mission. La 46ième mission est bel et bien finie! La 47ième ne commencera vraiment qu'au départ de la campagne d'été, lorsque nous serons plus que 28 hommes isolés sur notre rocher. Nous avons enfin pu avoir nos malles personnelles (chaque hivernant a le droit d'emmener jusqu'à 130 kgs d'effet personnel). Mine de rien, au bout d'un moment, on a très envie de pouvoir mettre ses propres vêtements (l'IFRTP nous fournit un beau trousseau de vêtements et chaussures mais bon, de voir tout le monde avec la même chemise à carreau, ça lasse!).

Ou même de pouvoir écouter ses CD, lire ses bouquins... Puis il a fallu aussi ranger les fournitures "scientifiques": consommables pour tout l'hiver et les nouveaux matériels (dont un super pentium 100 de bureau pour le magnétisme!).

Dimanche 12 janvier 1997 :

Journée "coupure centrale électrique". Comme chaque été, la centrale électrique est arrêté pour maintenance. Du coup, tous les équipements électriques sont arrêtés (sauf les acquisitions scientifiques qui sont sur onduleur). J'ai quand même arrêté les acquisitions de secours pour ne laisser tourner que le minimum, histoire d'économiser au maximum les batteries... J'en ai profité aussi pour faire un bon nettoyage dans le coin: remise en ordre des câbles, démontage vérification et nettoyage des équipements, nettoyage des shelters...

C'était aussi le grand nettoyage de printemps sur la base: tout le monde, enfin disons les volontaires, s'est afféré pour rendre propre l'extérieur de la base (ramassage d'éventuels détritus sur le sol... et dieu sait que ça s'accumule vite même en faisant attention de ne rien jeter!) Le soir, il a fallu relancer les acquisitions après remise du courant et bien sûr, il y a toujours des ratés dans ces cas là. Du coup, le temps de résoudre tout ça, c'est très tard que j'ai rejoins les bras de morphée.

Lundi 14 janvier 1997 :

Nous avons commencer à déménager les laboratoires de magnétisme et sismologie. Et oui! Sur notre petite île des pétrels, la place est un vrai problème. Le coût d'un nouveau bâtiment et son impact écologique étant prohibitif, nous sommes obligés de réduire la place pour l'installation de nouveaux laboratoires. En effet, l'été prochain, le SHOM (service hydronographique et océanographique de la marine) s'installe pour cartographier les alentours de la côte. Nous nous installons donc dans le bâtiment appelé "géophy" avec les autres laboratoires de géophysique.

De nos jours, les équipements se miniaturisent, mais pour cette campagne d'été, en plus des installations de nouveaux matériels, le déménagements des acquisitions est un gros travail. Tant mieux! On n'aura donc pas le temps de s'ennuyer... Il faut donc tirer des câbles, déménager des ordinateurs et autres appareils, et surtout faire le tri dans les accessoires et documents qui datent de "l'an pèbre" et qui ne servent plus!

Jeudi 16 janvier 1997 :

Ce soir, promenade sur la banquise (enfin, le peu qui reste) vers les manchots empereurs où il a une trentaine de phoque qui se prélasse sur les larges plaques de glace qui flottent. Quelques manchots empereurs juvéniles attendent de perdre leurs dernières plumes de poussins pour se jeter à l'eau. Ils subsistent tant bien que mal, abandonnés par leurs parents ainsi que par les autres poussins déjà en train de "batifoler "dans la mer... Les skuas, oiseaux rapaces, attendent patiemment qu'ils meurent de faim ou d'épuisement, pour se régaler!

En remontant à la base, nous sommes passé par le laboratoire de biologie marine (appelé "Biomar"). Eux aussi installent leurs nouveaux matériels. En particulier un ordinateur avec carte son spéciale pour l'étude des "chants" des manchots (oui, il parait que les manchots empereurs chantent!). Ces oiseaux sont tous semblables les uns des autres. Alors pour se reconnaître (surtout dans un couple et leur poussin), ils utilisent leurs chants. Le chant de la femelle est différent de celui d'un mâle, différent aussi de celui du poussin, c'est un fait connu. Mais comment se passe exactement la reconnaissance vocale, c'est encore une chose assez peu connue. Les empereurs se reconnaissent grâce au chant En fait, il y aurait une histoire de modulation de fréquence mais mais bon, laissons faire nos ornithologues et nous verrons les premiers résultats en fin d'hivernage...

 

 



 

   


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